Le tour de terrain : votre indicateur de gestion le plus efficace

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Nombreux sont les managers qui, arrivés sur leur lieu de travail, sont pris par les réunions et ne quittent leur bureau que tard dans la journée. Ils ont été occupés toute la journée par une série de choses à faire, aussi urgentes et importantes les unes que les autres. Faisant le bilan de leur journée, ils ont, en définitive, le sentiment de n’avoir répondu qu’à des sollicitations sur lesquelles ils n’ont qu’une faible emprise et de ne pas avoir réalisé ce qu’ils avaient prévu. Ils sont tellement emprisonnés dans l’urgence et l’immédiat qu’ils ont du mal à savoir comment les choses se passent au sein de leur équipe.

Peut-être vous retrouverez-vous dans cette situation. Si vous voulez sortir de ce cercle vicieux, je vous propose un outil qui ne vous prendra qu’un quart d’heure par jour et vous donnera la meilleure information sur le déroulement des activités de votre service : le tour de terrain.

Le tour de terrain, c’est quoi ?

C’est un moment défini dans la journée durant lequel le manager se rend sur le lieu de travail des gens, là où l’activité opérationnelle de leur service se réalise, pour ressentir le déroulement de l’activité et dialoguer avec les collaborateurs.

Pourquoi est-ce important de mener un tour de terrain ?

Il y a plusieurs raisons à la réalisation d’un tour de terrain.

  1. La première est de permettre de sentir comment l’activité se déroule, les tensions, les problèmes et difficultés que les gens rencontrent. Le manager peut intervenir immédiatement pour permettre de résoudre les problèmes. Si la relation entre manager et collaborateurs s’inscrit dans la confiance, le seul fait d’être présent parmi les troupes suffit à apaiser les acteurs en difficulté sans que personne ne sache expliquer ce qui a été fait pour calmer les choses.
  1. C’est aussi un moyen de réaliser des observations. En venant périodiquement sur le terrain, le manager bénéficie d’un recul par rapport au déroulement du travail. De par son expérience et ce recul, il sera attiré par les problèmes, incohérences, etc. Il pourra susciter les améliorations et faire progresser la manière dont le service travaille tant sur les processus que sur la communication et les dimensions humaines.
  1. C’est également un moment privilégier que le manager a de dialoguer avec ses collaborateurs et de les aider à prendre de la distance par rapport à ce qu’ils réalisent. Il est fréquent de se retrouver dans une situation où le collaborateur est en difficulté et où le manager en lui posant des questions de compréhension lui permet de trouver la solution.
  1. Venir sur le terrain est également une communication très claire du manager à l’attention de ses collaborateurs : “Vous êtes sur le pont, je le suis avec vous et je n’ai pas peur de ce qui se passe”. Savoir son manager à côté de soi, même s’il ne peut apporter de réponse, est rassurant et motivant pour le collaborateur. Ce dernier le comprend comme : “il ne nous laisse pas tomber”. C’est donc un outil de motivation précieux et de consolidation de l’équipe.
  1. Par les questions que le manager pose à son collaborateur, il peut le coacher de manière différente de celle d’un formateur ou éventuellement de son supérieur direct dans la situation où le manager est son N+1. Il lui apporte alors des dimensions supplémentaires qui ne seront pas forcément visibles directement mais qui, à terme, sont très profondes : les valeurs, le lien avec la vision d’entreprise ou de département, la nécessité de sortir du cadre strict de l’action, le sentiment de faire progresser les choses, le positionnement de l’activité dans la relation client, etc.
  1. Finalement, le tour de terrain est un moyen d’occuper le territoire. Si le manager ne le fait pas quelqu’un d’autre le fera. A ce moment, le manager sera en difficulté car il lui sera difficile de reprendre la position.

Comment faire le tour de terrain ?

La réponse est simple : le plus naturellement du monde. Soyez vous-même !

Il est primordial d’éviter de prendre quoi que ce soit avec soi (ni papier ni crayon), ceci pour être pleinement dans le rôle d’observateur et d’ouverture aux gens.

Si le manager prend de quoi noter, le message qu’il transmet est le suivant : “je viens à la pêche aux problèmes. S’il vous plait, donnez m’en !”. Les collaborateurs le comprennent tout de suite et ne se priveront pas pour en donner.

Mais si une question est posée et nécessite une action, que faire ? Partant du principe Kaizen qui veut que c’est celui qui fait qui sait, la première réaction est de demander au collaborateur ce qu’il ferait. Le manager verra si le collaborateur est à l’aise par rapport au problème et y a réfléchi. Dans la plupart des cas, les gens savent ce qu’il y a à faire mais n’ose pas se lancer. En posant des questions ouvertes, on invite le collaborateur à se jeter à l’eau. S’il n’a pas d’idée, on peut lui lancer des pistes et l’aider à réfléchir. C’est une manière de le coacher.

Mais si un problème nécessite de prendre note ? C’est alors simple : le manager demandera que la personne lui prépare un document ou le note pour lui.

Ce n’est que dans des cas extrêmes que le manager prendra la main (urgence, risque important d’accident ou d’incident par exemple). Mais il veillera à débriefer les actions qu’il a prises avec son collaborateur ensuite.

Le maître mot dans la manière de faire est de poser les bonnes questions (généralement ouvertes) et de prendre le temps.

Les effets du tour de terrain

La réalisation du tour de terrain est un excellent indicateur de gestion centré sur la perception éclairée du déroulement de l’activité. Il complète les indicateurs de gestion avec la perception du manager de l’environnement, l’atmosphère et le déroulement de l’activité.

Nous l’avons plus haut, le message transmis aux collaborateurs est très clair car il est vécu. Un manager qui fait un tour de terrain n’a pas besoin de dire à ses collaborateurs qu’il est à leur côté car les gens l’ont vu. Par contre, le manager qui reste dans son bureau ressentira le besoin de dire qu’il est à la disposition de son équipe. Il le dira mais ne sera pas cru !

Cette présence est une excellente motivation pour l’équipe qui la ressentira instantanément : nous ne sommes pas seuls !

Dans une entreprise que je connais, un incident sérieux s’était produit durant le week-end. Informé, le patron de l’entreprise s’y est rendu. Durant la gestion de l’incident, il n’a rien fait, laissant les spécialistes (ingénieurs et techniciens) agir. La seule chose qu’il a faite est de s’assurer que les acteurs disposaient de tout ce dont ils avaient besoin. Après la crise, les gens ont parlé longtemps de la présence du patron à leurs côtés avec la même réaction : “il ne nous a pas laissé tombé !”

Quels sont les pièges à éviter ?

Lorsque l’on veut réaliser un tour de terrain, il est important d’être vigilent à certaines choses, sinon on risque de se piéger.

Le premier piège à éviter est de retourner à son bureau avec une liste impressionnante de problèmes à solutionner. Pour éviter ce piège, je vous conseille de ne rien prendre avec vous comme évoqué plus haut. Ainsi, le message sera clair pour tous : votre présence n’est pas à considérer comme la “prise de commande” de toutes les doléances.

Le deuxième piège à éviter est d’intervenir dans le déroulement des opérations après avoir identifier un dysfonctionnement alors que les opérationnels ne l’ont pas identifié. Il vaut mieux, dans ce type de situation poser des questions qui amèneront les acteurs de terrain à identifier le problème. Une question clé dans ce type de situation est la question “pourquoi”. Il faudra probablement la poser plusieurs fois avant que son interlocuteur n’identifie le problème et … la solution.

Eviter ces deux pièges permet de faire ce que je recommande souvent aux managers : devenir paresseux, mais de manière intelligente.

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